Le droit à l’oubli

Est-il possible d’effacer ses traces en ligne ?

Dans une certaine mesure, oui. C’est ce que prévoit le « droit à l’oubli », ou plus précisément le droit à l’effacement. Il ne s’agit cependant pas d’un droit absolu, mais bien d’un droit conditionné et évalué au cas par cas.

Ce droit est encadré par deux législations principales :

    1. La loi belge du 30 juillet 2018 relative à la protection des personnes physiques à l’égard des traitements de données à caractère personnel. Elle prévoit un droit à l’information sur le traitement de nos données (articles 37-38) ainsi qu’un droit de rectification et de complétion si ces données sont inexactes (article 39).
    2. Le Règlement général sur la protection des données (RGPD), entré en vigueur le 25 mai 2018 dans toute l’Union européenne, précise et renforce ces droits, notamment à travers :
      • le droit à l’effacement (article 17)
      • le droit d’opposition (article 21)
      • le droit à la rectification (article 16)
      • le droit à la limitation du traitement (article 18)

Concrètement, que signifie le droit à l’oubli ?

Il permet de demander la suppression de données personnelles à un responsable de traitement (comme un site internet), dans certaines circonstances. Toutefois, il ne suffit pas de dire que l’on n’aime pas voir ces données publiées. Il faut motiver sa demande et prouver qu’elle est justifiée (par exemple, si la publication cause un préjudice, ou si les données ne sont plus nécessaires).

Les motifs reconnus pour faire valoir ce droit sont précisés dans l’article 17 du RGPD, notamment :

    • Les données ne sont plus nécessaires aux finalités pour lesquelles elles ont été collectées.
    • La personne concernée retire le consentement sur lequel est fondé le traitement […] (le consentement a dû être donné pour une ou plusieurs finalités spécifiques), et il n’existe pas d’autre fondement juridique au traitement.
    • La personne s’oppose au traitement du fait que le traitement des données à caractère personnel n’est pas licite, et il n’existe pas de motif légitime impérieux pour le traitement, ou la personne concernée s’oppose au traitement des données si celles-ci sont utilisées à des fins de prospection.
    • Les données à caractère personnel ont fait l’objet d’un traitement illicite.
    • Les données à caractère personnel doivent être effacées pour respecter une obligation légale qui est prévue par le droit de l’Union ou par le droit de l’État membre auquel le responsable du traitement est soumis.
    • Les données concernent un mineur n’ayant pas atteint l’âge requis pour consentir seul. En Belgique, cet âge est fixé à 13 ans.

Un droit pas si absolu…

Même si les conditions sont remplies, le gestionnaire d’un site peut refuser la suppression dans certains cas. Par exemple, si les données relèvent de l’intérêt public, ou si leur traitement relève de la liberté d’expression, de la liberté de la presse ou encore du droit à l’information.

Ce droit à l’oubli est donc en réalité un droit à l’opposition, qui est soumis à un arbitrage entre plusieurs droits fondamentaux.

Disparaître des résultats dans les moteurs de recherche

Un arrêt historique de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) du 13 mai 2014 a élargi le champ du droit à l’oubli. La Cour y affirme que les moteurs de recherche (comme Google) sont responsables du traitement des données, au même titre que les sites web eux-mêmes. Par conséquent, ils peuvent être contraints de déréférencer certaines pages de leurs résultats de recherche, si les informations ne présentent plus d’intérêt public, ou si elles sont obsolètes, inexactes, ou nuisibles.

Il s’agit ici d’un droit au déréférencement, et non d’un effacement total : le contenu reste accessible en ligne, mais il ne sera plus lié au nom de la personne dans les résultats du moteur de recherche. Pour supprimer totalement l’information, il faut aussi contacter le gestionnaire du site source.

Ce « droit au déréférencement » est néanmoins très utile lorsque le nom d’une personne est mentionné sur plusieurs sites internet différents et qu’il est difficile d’écrire à chaque gestionnaire de sites distincts. S’il s’agit par contre d’un site en particulier, il est plus pertinent de d’abord demander au gestionnaire du site d’effacer vos données. Si celui-ci refuse, il est toujours possible de s’adresser à Google. 

Quelle démarche suivre pour exercer ce droit ?

Pour faire valoir ce droit, il faut adresser une demande claire et motivée :

    • Au gestionnaire du site d’abord, pour une suppression directe.
    • Au moteur de recherche (comme Google, ou Bing) ensuite, pour un déréférencement. Chaque moteur de recherche doit rendre accessible un formulaire de demande de déréférencement. Vous trouverez par exemple ici celui de Google et Bing
    • Si besoin, à l’Autorité de protection des données.

Pour plus d’info, consultez nos articles :

MAJ 2025




Comment introduire une demande de suppression de mes données ?

Pour introduire une demande de suppression de vos données personnelles auprès d’un site Internet

Depuis l’entrée en vigueur le 25 mai 2018 du nouveau Règlement général européen sur la protection des données (RGPD), vous pouvez introduire votre demande de suppression ou de rectification de vos données auprès du responsable du traitement des données.
Le responsable du traitement a l’obligation de répondre dans le mois à la demande mais si la demande est complexe, le délai peut être prolongé de 2 mois.

Pour introduire une demande de suppression auprès des moteurs de recherche

Google a mis en ligne un formulaire spécifique, Bing a également un formulaire en ligne, pour introduire votre demande de déréférencement. Une fois votre demande introduite, le gestionnaire du moteur de recherche a un mois pour vous répondre. S’il refuse, vous pouvez également attendre de lui qu’il motive ce refus. En examinant votre demande, le gestionnaire doit trouver un équilibre entre votre intérêt en tant que personne concernée de protéger votre vie privée et l’intérêt de la société d’être informée.

Vous pouvez également contacter l’Autorité de protection des données – APD pour faire une demande de médiation et ainsi tenter d’obtenir un accord entre les parties.

Si vous êtes convaincu(e) d’avoir donné une bonne raison de faire supprimer vos données mais que votre demande a été refusée

Tout d’abord, si vous avez introduit une demande de médiation auprès de l’APD mais qu’aucun accord n’a été trouvé, l’APD, avec votre accord, convertira cette demande en plainte. Ensuite, si vous avez fait valoir vos droits mais que le responsable du traitement de vos données reste muet ou n’a pas donné une suite favorable à votre requête, vous pouvez contacter lAPD pour introduire une plainte. En effet, l’APD peut imposer le retrait des données au moteur de recherche (depuis l’entrée en vigueur du nouveau Règlement général sur la protection des données (RGPD).

Vous pouvez aussi vous adresser au tribunal. Il faudra s’adresser au juge de paix pour trancher un litige d’un montant allant jusqu’à 5000 €. Si le montant demandé est supérieur à 5000 €, il faudra vous adresser au Tribunal de première instance.

Effacer ses données en ligne est donc possible mais ce n’est pas aisé et ce n’est certainement pas un droit absolu. Il est important de garder cela en tête lorsque l’on partage certaines informations nous concernant sur internet. Lorsque nous partageons nous-mêmes certaines informations sur une plateforme en ligne, nous conservons le contrôle sur le suivi de ces informations, y compris leur suppression si tel est notre souhait. Il faut néanmoins garder en tête que ces informations peuvent toujours être reprises pour être utilisées par quelqu’un d’autre, dans un autre contexte et qu’il est alors plus difficile de les effacer si on le désire.

Voir aussi :

MAJ 2024