La loi contre le racisme et la xénophobie ou Loi antiracisme

Introduction

La loi du 30 juillet 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme ou la xénophobie est la première loi belge ayant eu pour objectif de s’attaquer à la question du racisme en Belgique. Elle est souvent désignée sous les termes « loi antiracisme » ou encore « loi Moureaux » du nom du socialiste Philippe Moureaux qui l’a proposée. Cette loi vise à combattre les discriminations, les discours de haine à caractère raciste ainsi que les infractions qui peuvent en découler.

Cette loi et les deux lois du 10 mai 2007 : celle tendant à lutter contre la discrimination entre les femmes et les hommes ainsi que celle tendant à lutter contre certaines formes de discrimination constituent l’arsenal juridique, au niveau fédéral, en matière de lutte contre les discriminations en Belgique.

Loi antiracisme et prise en compte de la question du racisme en Belgique

La loi antiracisme interdit toute discrimination fondée sur la nationalité, une prétendue race, la couleur de la peau, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique. Ces éléments constituent ce que la loi qualifie de « critères protégés ». Lorsqu’une situation de discrimination se présente, seule la violation de ces critères peut valoir condamnation sur base de cette loi et donc être qualifiée de situation ou comportement raciste selon la loi.

Du fait de l’importance de la lutte contre le racisme au niveau international et national, le législateur fédéral n’est pas le seul habilité à légiférer à ce sujet. Les entités fédérées (les régions et les communautés) peuvent également prendre des décrets ou des ordonnances sur la question du racisme dans le respect de leurs pouvoirs respectifs. Par exemple, les communautés, compétentes en matière d’enseignement, peuvent prendre des mesures sur la question du racisme au sein des écoles. Voici une liste non-exhaustive des décrets ou ordonnances prises en matière de lutte contre le racisme :

Il faut noter que ni la loi, ni les décrets et ni les ordonnances donnent une définition des critères protégés. Cela a pour conséquence que même si ces différents instruments énoncent les mêmes critères protégés, la définition de l’un ne vaut pas nécessairement pour l’autre.

Champ d’application

Les dispositions de la loi s’appliquent dans le cadre des relations de travail et la fourniture de biens et de services mises à la disposition du public que ce soit dans le secteur public (par exemple, un service communal) ou le secteur privé (par exemple, une assurance). La loi ne s’applique donc pas dans les rapports privés ou intrafamiliaux.

Cette loi comporte un volet civil et un volet pénal [1]. Cela signifie que la loi définit les discriminations et les moyens à mobiliser en cas de traitement défavorable sur base des critères protégés, en ce compris les règles procédurales, d’un côté, et détermine les infractions qui peuvent découler de ces discriminations, de l’autre côté.

La loi reconnait quatre formes de discrimination :

La discrimination directe

La loi vise la situation qui se produit lorsque, sur la base de l’un des critères protégés, une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre personne ne l’est, ne l’a été ou ne le serait dans une situation comparable.

Par exemple, refuser à une personne d’accéder à une boîte de nuit en raison de sa couleur de peau.

La discrimination indirecte

La situation qui se produit lorsqu’une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre est susceptible d’entraîner, par rapport à d’autres personnes, un désavantage particulier pour des personnes caractérisées par l’un des critères protégés.

L’injonction de discriminer

Ce terme vise tout comportement consistant à enjoindre à quiconque de pratiquer une discrimination, sur la base de l’un des critères protégés, à l’encontre d’une personne, d’un groupe, d’une communauté ou de l’un de leurs membres.

Par exemple, une personne souhaitant mettre à la location son appartement demande explicitement à l’agence immobilière de lui proposer exclusivement des candidats d’origine Belge.

Le harcèlement

Le harcèlement désigne un comportement indésirable qui est lié à l’un des critères protégés, et qui a pour objet ou pour effet de porter atteinte à la dignité de la personne et de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant.

Par exemple, un de vos collègues au travail ne cesse de faire des remarques offensantes et dégradantes sur les personnes d’une certaine origine.

Justification d’une discrimination : conditions

La loi reconnait la possibilité d’instaurer une distinction mais celle-ci doit respecter certaines conditions. En effet, dans un cas d’une distinction directe fondée sur une prétendue race, la couleur de peau, l’ascendance, l’origine nationale ou ethnique, elle doit être justifiée par une exigence professionnelle essentielle et déterminante. Cela signifie qu’une distinction fondée sur un des critères protégés (cités ci-dessus) doit impérativement résulter de la nature de l’activité ou les conditions de son exercice. Il faut également que cette distinction obéisse à un objectif légitime et qu’elle soit proportionnée par rapport à cet objectif. Cette distinction est autorisée uniquement dans le domaine des relations de travail.

Dans le cadre d’une distinction indirecte, la disposition, le critère ou la pratique apparemment neutre qui est au fondement de cette distinction sera justifié pour autant qu’il poursuive un objectif légitime et que les moyens utilisés soient proportionnés et nécessaires. En d’autres termes, il faut que cette distinction indirecte soit le seul moyen pour atteindre l’objectif de la loi.

La pertinence de cette justification est analysée au cas par cas par le juge.

Dispositions de protection

La loi instaure un système de protection contre les représailles. En effet, il peut arriver que lorsqu’une personne dénonce aux autorités compétentes la discrimination dont elle a fait l’objet ou dont elle a été le témoin, l’auteur de la discrimination décide d’user de son pouvoir pour écarter ou rendre l’existence difficile à cette personne. La loi prévoit donc une protection pour la (les) victime(s) et le(s) témoin(s) dès qu’une plainte a été introduite par la victime ou le témoin.

Par exemple, votre employeur a tenu des propos racistes à plusieurs reprises et se permet de vous traiter défavorablement du fait de votre origine et s’en cache peu. Vous décidez de dénoncer son comportement et vous portez plainte. Ce dernier l’apprend et décide, à son tour, de vous licencier. Sachez que votre employeur peut se voir condamner à vous verser six mois de salaire si le lien entre la connaissance de la plainte et le licenciement est retenu par le juge.

La victime de discrimination peut également introduire une action en cessation. Comme son nom l’indique, cette action a pour objectif d’interpeller l’auteur de la discrimination et exiger de sa part qu’il fasse cesser la discrimination. La victime peut prétendre à une indemnité forfaitaire et le juge peut ordonner d’afficher sa décision de cessation dans les lieux où la discrimination a eu lieu ou les locaux qui appartiennent à l’auteur. Il peut également ordonner la diffusion de son jugement dans la presse. La victime ou les personnes habilitées par la loi pour représenter la victime en justice peuvent introduire cette action en cessation. Il faut entendre par là, les structures qui réunissent certaines conditions, comme UNIA, le ministère public ou encore l’auditorat du travail.

Charge de la preuve

Dans le cadre d’une procédure civile, la charge de la preuve en matière de discrimination est renversée. Il revient à l’auteur présumé de la discrimination de démontrer qu’il n’y a pas eu de discrimination de sa part. Toutefois, la victime n’est pas exempte d’apporter la démonstration du comportement raciste. En effet, elle doit apporter des preuves de discrimination pour étayer ses dires : des écrits, des témoignages, des précédents signalements pour discrimination à l’égard de l’auteur, etc. D’ailleurs, c’est parce que la personne victime apporte des éléments concrets qui permettent de supputer une discrimination raciste que l’auteur présumé doit prouver qu’il ne s’est pas rendu fautif d’un acte raciste.

Dispositions pénales

Comme dit plus haut, la loi antiracisme comporte également un volet pénal. Cette partie fixe les différentes infractions qui découlent de certains comportements jugés inacceptables par le législateur.

Il faut noter que les décrets et les ordonnances relatifs à la question du racisme prévoient également des dispositions pénales.

Parmi les infractions que nous pouvons retrouver dans la loi antiracisme, nous pouvons, par exemple, citer les suivantes :

  • L’incitation à la haine, la discrimination, la violence ou la ségrégation d’une personne, d’un groupe, d’une communauté ou de leurs membres;
  • La diffusion d’idées fondées sur la supériorité ou la haine raciale ;
  • Le fait de faire partie d’un groupement ou d’une association qui, de manière manifeste et répétée, prône la discrimination ou la ségrégation fondée sur l’un des critères protégés ;
  • Le fait de nier, minimiser grossièrement, chercher à justifier ou approuver des faits correspondant à un crime de génocide, à un crime contre l’humanité ou à un crime de guerre
  • Le fait de ne pas se conformer au jugement de la demande de cessation.

Organismes compétents pour introduire une action en justice

Si vous êtes victimes de racisme, vous pouvez signaler la discrimination dont vous faites l’objet auprès d’un organisme habilité par loi, tel qu’UNIA, votre syndicat ou tout autre organisme qui réunit certaines conditions. Selon ses compétences, cette structure vous aidera à préparer votre dossier : porter plainte, prendre part à une médiation ou agir en justice.

Renforcement de la loi antiracisme

Une évolution de la loi est envisagée au niveau fédéral. En effet, l’avant-projet de loi de la secrétaire d’État à l’égalité des genres, l’égalité des chances et la Diversité, Sarah Schiltz, a été approuvé par le Conseil des ministres en décembre 2022. Cet avant-projet [2] de loi vise à renforcer les lois en matière de discriminations et de racisme en tentant de mieux tenir compte des manifestations des actes discriminatoires. Concernant la loi antiracisme, nous pouvons énoncer les modifications suivantes :

  • L’introduction des nouvelles formes de discrimination : les discriminations multiples, la discrimination par association et la discrimination fondée sur un critère supposé ;
  • Le renforcement des sanctions civiles : l’obligation pour le juge d’accorder des dommages et intérêts lorsque la victime le réclame et que l’existence de la discrimination a été établie, l’augmentation des montants des dommages et intérêts et l’instauration d’une indexation de ceux-ci ;
  • La réforme du Code pénal avec la prise en compte systématique du motif discriminatoire.

De plus, le gouvernement bruxellois a approuvé l’avant-projet d’ordonnance [3] de la secrétaire d’État à l’Égalité des chances, Nawel Ben Hamou, créant le Conseil consultatif pour l’élimination du racisme à Bruxelles. Cette nouvelle structure sera installée au sein de l’organe de concertation sociale Brupartners. Elle aura pour missions d’émettre des avis et des recommandations sur toute question relative à la lutte contre le racisme dans la région bruxelloise sur demande du gouvernement ou d’initiative. Petite innovation, elle réunira pour la première fois dans un organe public des associations antiracistes, des expert-e-s académiques, des partenaires sociaux, UNIA ainsi que des représentant-e-s du Conseil bruxellois pour l’Égalité entre les femmes et les hommes et celui des personnes en situation d’handicap.

Ce Conseil était cencé commencer ses travaux au plus tard pour le 1er janvier 2024.

[1] Le droit civil encadre les rapports entre les individus et règle les conflits qui naissent entre les particuliers. Ce droit comprend plusieurs branches telles que le droit de la famille, le droit économique, le droit des biens, des successions ou encore le droit des obligations.

Le droit pénal est le droit de la répression. En effet, ce droit rappelle à celui qui y contrevient que la loi a identifié des comportements qu’elle juge inacceptables dans la société. Ce droit a donc pour objectif de faire respecter l’ordre public et, de ce fait, protéger la société dans son ensemble.

En d’autres termes, en matière civile, le juge arbitre un litige qui oppose des personnes privées alors qu’en matière pénale, l’Etat, partie au procès, est présent pour défendre des valeurs et des comportements jugés essentiels par la loi au bon fonctionnement de la société.

[2] https://sarahschlitz.be/la-lutte-contre-les-discriminations-se-renforce-avec-lamelioration-des-3-lois-concernees/ ; un avant-projet de loi est un texte soumis par un membre du gouvernement fédéral à l’approbation du Conseil des ministres. Si le Conseil approuve ce texte, il le dépose à la Chambre des représentants en vue de l’éventuelle adoption d’une loi.

[3] Un avant-projet d’ordonnance est un texte soumis par un membre du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale à l’approbation du Conseil des ministres. Si le Conseil approuve ce texte, il le dépose au parlement bruxellois en vue de l’éventuelle adoption d’une loi.

Voir aussi :

MAJ 2024


Historique des lois contre le racisme et les discriminations


Définitions et discriminations

L’arsenal juridique en matière anti-discrimination en Belgique se compose principalement de trois lois fédérales :

Ces trois lois fixent plusieurs critères, dits critères protégés, et énoncent le principe suivant : toute discrimination fondée sur un critère protégé est interdite et punissable.

Gardez à l’esprit que ces lois sont complétées par les décrets et ordonnances adoptés par les communautés et les régions en matière de discrimination.

Passons en revue certaines discriminations visées par ces lois et, surtout, définissons-les afin d’avoir une meilleure compréhension des différentes notions employées.

Discrimination

La discrimination désigne le traitement injuste ou inégal d’une personne ou groupe de personnes sur base de caractéristiques personnelles.  Toute forme de discrimination sur base d’un critère protégé est condamnée par la loi. Le législateur ne prend en compte, pour l’heure, que certaines formes de discrimination :

La discrimination directe :

Situation qui se produit lorsque sur la base de l’un des critères protégés, une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre personne ne l’est, ne l’a été ou ne le serait dans une situation comparable [1] ;

La discrimination indirecte :

Situation qui se produit lorsqu’une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre est susceptible d’entraîner, par rapport à d’autres personnes, un désavantage particulier pour des personnes concernées par un critère protégé déterminé [2] ;

L’injonction de discriminer :

Tout comportement consistant à enjoindre à quiconque de pratiquer une discrimination, sur la base d’un critère protégé, à l’encontre d’une personne, d’un groupe, d’une communauté ou de l’un de leurs membres [3] ;

Le harcèlement :

Comportement indésirable qui est lié à un critère protégé, et qui a pour objet ou pour effet de porter atteinte à la dignité de la personne et de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant [4] ;

Le harcèlement sexuel :

Comportement non désiré à connotation sexuelle, s’exprimant physiquement, verbalement ou non verbalement, et qui a pour objet ou pour effet de porter atteinte à la dignité d’une personne et, en particulier, de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant. Cette forme de discrimination figure uniquement dans la loi genre [5].

Il est à noter qu’une différence de traitement entre deux personnes est autorisé pour autant que cette distinction se fonde sur une justification objective et raisonnable, c’est-à-dire qu’elle poursuit un but légitime ou il existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé [6]. D’ailleurs chacune de ces lois permet l’instauration une distinction directe ou indirecte pour autant que certaines conditions soient remplies.

Avec l’apparition d’internet et des réseaux sociaux, un nouveau type d’harcèlement s’est développé : le cyberharcèlement.  Celui-ci vise tout acte utilisant différentes formes de communication électronique (réseaux sociaux, mail, sms, chat, sites) pour menacer, insulter de manière intentionnelle et répétitive une victime. Il est accompli par un individu ou un groupe d’individus envers une personne ou un groupe de personnes. Le harcèlement est une infraction en vertu du Code pénal. La peine peut être alourdie si le juge retient des circonstances aggravantes. Si une discrimination fondée sur un critère protégé participe au cyberharcèlement alors le juge peut retenir les circonstances aggravantes.

Mesures d’action positive

Le législateur belge emploie le terme d’ « action positive » plutôt que celui de « discrimination positive ». Les mesures d’actions positives désignent, par exemple, des mesures spécifiques prises par un employeur à l’égard d’un groupe de personnes défavorisées sur base d’un critère protégé sur le marché de l’emploi en vue d’inverser la tendance et de garantir une égalité de traitement dans la pratique. En d’autres termes, c’est un mécanisme qui permet à un employeur de déroger à l’interdiction de discriminer sur base d’un critère protégé.

Par exemple, un employeur souhaite mener une campagne de recrutement pour groupes-cibles. Il décide de mettre un quota d’embauches pour les personnes porteuses d’un handicap. A la fin de la procédure de recrutement, il y aura au moins le nombre souhaité de personnes ayant un handicap qui seront embauchées.

Parce qu’il s’agit d’une exception aux lois en matière de lutte contre les discriminations, certaines conditions doivent donc être remplies. Tout d’abord, les mesures d’actions positives doivent être contenues dans un plan. Celui-ci est établi soit par une convention collective de travail soit par un acte d’adhésion. Ces mesures doivent respecter les exigences suivantes :

– il doit exister une inégalité manifeste ;
– la disparition de cette inégalité doit être désignée comme un objectif à promouvoir ;
– la mesure d’action positive doit être de nature temporaire, étant de nature à disparaître dès que l’objectif visé est atteint ;
– la mesure d’action positive ne doit pas restreindre inutilement les droits d’autrui. Elle doit donc être proportionnée à l’objectif.

Ensuite, ce plan doit être soumis au Ministre de l’Emploi pour approbation. Celui-ci s’attèle à vérifier le respect des conditions requises et si l’action positive porte bel et bien sur un des critères protégés.

Enfin, ce n’est qu’à l’obtention de l’approbation que la mesure pourra être mise en œuvre par l’employeur.

Racisme

Le racisme est une idéologie fondée sur la croyance qu’il existe une hiérarchie entre les différents groupes ethniques, les prétendues races. Les actes racistes englobent donc toutes attitudes et hostilités qui découlent de cette idéologie, à l’encontre d’un individu ou d’un groupe d’individus.

La notion de race n’existe pas. Elle a été construite pour justifier la domination et la violence par un peuple sur un autre (l’esclavage, la colonisation, la ségrégation, l’apartheid, la Shoah, etc.). La communauté scientifique a conclu à l’inexistence de plusieurs races humaines et rejette dorénavant à l’unanimité tout argument biologique qui souhaite légitimer la notion de race.

Malgré cela, le terme race continue d’être utilisé. D’ailleurs la loi y a recours, elle parle de « prétendue race ». Son emploi reste pertinent car cette construction sociale (la race) continue d’impacter socialement, économiquement et culturellement les personnes dites racisées. Elle permet de comprendre les rapports qui structurent les différentes sociétés. C’est donc un rappel de ce passé qui n’est pas encore exorcisé.

La suppression ou le fait de le rendre tabou ne permet pas de faire disparaitre le racisme et ses conséquences.

Le racisme est sanctionné par la loi du 30 juillet 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme et la xénophobie, dite loi antiracisme.

Racisme systémique

Le caractère systémique du racisme renvoie à la prise de conscience que le racisme est également un système, à savoir un ensemble de pratiques organisées dans un but. Pour discerner les différentes manifestations du racisme dans nos sociétés, il ne faut pas uniquement se référer aux rapports entre les individus. En d’autres termes, le racisme doit également s’analyser à un niveau macro pour comprendre pourquoi à ce jour certains groupes de populations sont toujours traités d’une certaine manière.

Le racisme perdure dans nos sociétés parce que l’histoire de nos sociétés et de ses institutions y sont imprégnées. Cette histoire du racisme a laissé des traces qui ne peuvent pas s’effacer aussi facilement. Comme le nazisme n’est pas mort avec Hitler, certaines idées, théories développées pour justifier le racisme sont encore bien vivantes malgré le changement d’époque. Le système, comme les êtres humains, ne se transforme pas aussi rapidement que nous pouvons l’espérer.

Le racisme prend différentes formes, voici quelques exemples :

L’antisémitisme

Vise deux critères protégés : l’origine ethnique et la conviction religieuse. Il se définit comme une hostilité systématique envers les juifs, les personnes perçues comme telles ou la religion juive [7]. Selon la jurisprudence belge, la négation ou l’approbation, entre autres, de la Shoah peuvent être qualifiées d’antisémitisme [8].

L’islamophobie

L’islamophobie renvoie également à la violation de deux critères protégés : l’origine ethnique et la conviction religieuse. L’islamophobie peut être donc définie comme la haine, le mépris ou l’hostilité à l’égard des personnes d’origine arabe, maghrébine, turque ou perçues comme telles ou des personnes musulmanes ou considérées comme telles.

La négrophobie

La négrophobie est la haine, le mépris ou l’hostilité à l’égard des personnes d’ascendance africaine.

Xénophobie

La xénophobie désigne l’hostilité systématique manifestée à l’égard des étrangers (les migrants, les demandeurs d’asile, les réfugiés) ou des personnes perçues comme telles [9].

Les termes racisme et xénophobie sont apparus au même moment. Toutefois, ils désignent des réalités différentes. En effet, la xénophobie désigne la haine, le mépris ou l’hostilité à l’égard d’une personne étrangère ou considérée comme telle ; alors que le racisme vise plutôt les origines d’une personne et suppose un classement des personnes en fonction de leur prétendue race [10].

Sexisme

Le sexisme désigne tout geste ou comportement qui a manifestement pour objet d’exprimer un mépris à l’égard d’une personne, en raison de son appartenance sexuelle, ou de la considérer, pour la même raison, comme inférieure ou comme réduite essentiellement à sa dimension sexuelle et qui entraîne une atteinte grave à sa dignité.

Le sexisme part des différences qui existent entre les femmes et les hommes et les essentialisent, c’est-à-dire que les femmes et les hommes sont réduits à certaines dimensions de leur sexe. Ces différences sont associées à des rôles spécifiques et à des positions dans la société. Il en découle un ensemble de préjugés, de croyances et de stéréotypes visant les femmes et les hommes.

Toute discrimination fondée sur l’appartenance sexuelle est sanctionnée par la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre la discrimination entre les femmes et les hommes, dite loi genre. Cette loi a été renforcée par la loi du 22 mai 2014 qui institue le sexisme comme infraction.

Homophobie

L’homophobie désigne toutes les manifestions de mépris, de rejet voire de haine à l’encontre de personnes homosexuelles ou perçues comme telles. Bien que l’homophobie, la lesbophobie et la biphobie relèvent du même mécanisme, leurs manifestations peuvent être différentes.

L’orientation sexuelle constitue un critère protégé par la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination, dite loi anti-discrimination.

Aménagement raisonnable

Cette notion est liée à la discrimination à l’égard des personnes ayant un handicap. Elle est reprise dans la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination, dite loi anti-discrimination.

La législation sur la discrimination basée sur le handicap en Belgique est avant tout le fruit d’un travail au niveau international, plus précisément des Nations Unies. La convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées et son Protocole facultatif a été adopté le 12 décembre 2006 et est entrée en vigueur le 1er août 2009 en Belgique. Cette convention définit les personnes ayant un handicap comme « des personnes qui présentent des incapacités physiques, mentales, intellectuelles ou sensorielles durables dont l’interaction avec diverses barrières peut faire obstacle à leur pleine et effective participation à la société sur la base de l’égalité avec les autres [11] ». Cette définition large permet ainsi de viser toutes les formes d’handicaps et donc toutes les personnes porteuses d’un handicap sans distinction. Par cette Convention, il est rappelé aux États, signataires et l’ayant intégré dans leur arsenal juridique, que toute personne, en ce compris les personnes ayant un handicap, a des droits et qu’elle doit pouvoir les exercer. Toutefois, l’exercice de leurs droits peut s’avérer impossible pour les personnes ayant un handicap. C’est pourquoi  ces personnes ont droit à des aménagements raisonnables pour rendre l’exercice de leur droit effectif.

Il faut entendre par aménagements raisonnables toutes les modifications et ajustements nécessaires et appropriés n’imposant pas de charge disproportionnée ou indue, apportés, en fonction des besoins dans une situation donnée, pour assurer aux personnes ayant un handicap la jouissance ou l’exercice, sur la base de l’égalité avec les autres, de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales [12].

Il y a donc une discrimination fondée sur le handicap en cas de distinction, exclusion ou restriction fondée sur le handicap qui a pour objet ou pour effet de compromettre ou réduire à néant la reconnaissance, la jouissance ou l’exercice, sur la base de l’égalité avec les autres, de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social, culturel, civil ou autres. La discrimination fondée sur le handicap comprend toutes les formes de discrimination, y compris le refus d’aménagement raisonnable [13].

[1] Article 4, 7° loi anti-discrimination ; article 4, 7° loi antiracisme ; article 4, 6° loi genre

[2] Article 4, 9° loi anti-discrimination ; article 4, 9° loi antiracisme ; article 4, 8° loi genre

[3] Article 4, 13° loi anti-discrimination, article 4, 12° loi antiracisme ; article 4,12° loi genre

[4] Article 4, 10° loi anti-discrimination, article 4, 10° loi antiracisme ; article 4, 9° loi genre

[5] Article 4,10° loi anti-discrimination

[6] Ziller, J., (2020), Les principes d’égalité et de non-discrimination – une perspective en droit comparé, p.26

[7]  https://www.cncd.be/IMG/pdf/2020-12-lexique-termes-decoloniaux.pdf, p. 19

[8] https://www.unia.be/fr/criteres-de-discrimination/racisme/comprendre-le-racisme

[9] https://www.cncd.be/IMG/pdf/2020-12-lexique-termes-decoloniaux.pdf, p. 18 ; https://www.unia.be/fr/criteres-de-discrimination/racisme/comprendre-le-racisme

[10] https://www.cncd.be/IMG/pdf/2020-12-lexique-termes-decoloniaux.pdf, p. 18

[11] Article 1er Convention

[12] Article 2 Convention

[13] Article 2 Convention

Voir aussi :

MAJ 2024


Que faire si on est victime de discrimination?

Si vous êtes victime ou témoin d’actes de discriminations (racisme, sexisme, envers les personnes ayant un handicap, homophobie, etc.), des services spécialisés (voir adresses utiles) peuvent vous informer, recueillir votre plainte, analyser la situation présentée, vous orienter vers un autre organisme, organiser une médiation ou vous expliquer les recours légaux possibles sur la base des lois. Retenez le plus de détails possibles, noms des témoins, photos, etc.

Victime ou témoin d’actes de discriminations ?

  • Unia est habilité à recevoir et à traiter des plaintes individuelles pour infractions aux lois contre le racisme et contre le négationnisme, contre les discriminations, l’homophobie. Unia ne saisit le tribunal que si une solution extrajudiciaire s’avère impossible. Quiconque en Belgique se sent discriminé ou est témoin de discrimination peut s’adresser à Unia. Découvrez ici comment votre signalement sera traité. Unia tente toujours de trouver une solution négociée. Cela échoue ? Unia, avec l’accord de la personne qui s’estime l’objet de discrimination, peut alors intenter une procédure judiciaire ou y participer. Unia ne s’adresse au tribunal que dans un nombre limité de cas. Consultez à ce sujet la base de données pour y découvrir des solutions négociées par Unia et la jurisprudence concernant la discrimination ;
  • Le MRAX a un service juridique/Bureau des plaintes qui propose accueil, écoute, soutien, conseil, aide à la construction de dossiers, conciliation, médiation et parfois action en justice ;
  • La Maison Arc-en-ciel regroupe une trentaine d’associations LGBTQIA+ francophones et néerlandophones de la Région de Bruxelles-Capitale. Elle dispose d’un service de signalement. Attention il s’agit d’un service d’écoute mais il n’est pas habilité à traiter des faits qui leur sont rapportés. Toutefois, elle s’attèle à réorienter les victimes d’agression verbale, physique et d’harcèlement vers les services adéquats ;
  • L’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes (IEFH) est habilité à recevoir et à traiter des plaintes pour infraction à la loi contre la discrimination entre les femmes et les hommes. L’IEFH est compétent pour les discriminations basées sur les critères protégés suivants : sexe, grossesse, accouchement, allaitement, maternité, adoption, procréation médicalement assistée, identité de genre, expression de genre, « changement de sexe », caractéristiques sexuelles, paternité et co-maternité ;
  • Les Services d’aide aux victimes ou le site victimes.be : Ces services sont à disposition de la population afin qu’elle puisse s’informer sur ses droits et obtenir des explications quant au déroulé de la procédure à laquelle elle est pleinement partie ;
  • On peut aussi s’adresser à un avocat ou directement au Parquet dans certaines circonstances.

S’il y a urgence, contactez le 101 (Assistance policière urgente) ou le 112 (numéro d’appel d’urgence européen) ou le 103 (point de contact Cyberharcèlement).

Vous pouvez également vous rendre à la police, allez au commissariat le plus proche ou celui de votre choix pour déposer votre plainte. Il existe ces services d’assistance policière aux victimes qui peuvent vous aider à porter plainte mais également vous préparer, vous accompagner et vous soutenir lors de votre audition avec un fonctionnaire de police. Ces services sont intégrés à la police locale et fédérale. Ils sont présents dans chaque zone de police (police locale) et dans chaque arrondissement (police fédérale). Seules les personnes qui n’ont pas encore déposé une plainte peuvent bénéficier de leur aide. Ces services procurent une aide à court terme et n’hésiteront pas à vous orienter vers les services adéquats pour une prise en charge plus longue si vous en exprimez le souhait.

Pour prendre contact avec ces services au niveau de la police locale rendez-vous sur le site www.police.be. Il vous suffit d’introduire votre code postal et vous serez dirigé vers le vite de votre zone de police. Vous pouvez accéder aux coordonnées des services au niveau fédéral sur ce lien-ci.

La victime de discrimination et les témoins sont protégés contre les représailles dès que la plainte est introduite, aucune mesure préjudiciable ne peut être prise contre eux (par exemple : le licenciement).

Il reste utile d’avertir des organismes comme Unia, le MRAX, l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes, car même si votre plainte n’aboutit pas, elle peut servir à la constitution d’un dossier plus important en cas de récidive, si d’autres personnes sont concernées. Par ailleurs, votre plainte permet de suivre la « traçabilité » du racisme et des discriminations dans notre pays. En effet, les différents organismes comptabilisent les plaintes et c’est sur cette base qu’ils établissent leur rapport et leurs statistiques.

Faut-il apporter des preuves ?

Les lois introduisent la notion de « partage de charge de la preuve ». Dès que des éléments montrent qu’il y a discrimination, c’est l’auteur présumé de la discrimination qui doit apporter la preuve qu’il n’a pas discriminé. Si c’est possible, la victime peut conserver des preuves (courriers, témoignages, notes de service, constat d’huissier, etc.) de la discrimination pour étayer son dossier.

Un juge pourra également se servir des « tests de situation » c’est-à-dire des éléments qui permettent de :
– constater une « récurrence de traitements » défavorables à l’égard de personnes partageant un critère protégé (refus répétés de laisser entrer des personnes de couleur dans une discothèque) ;
– révéler que la situation de la victime de traitement défavorable est comparable à la situation d’une personne de référence (à travail égal, salaire inégal entre un homme et une femme).

Quelles sanctions pour l’auteur ?

L’auteur de discrimination pourra être condamné au paiement d’une indemnité forfaitaire ou à une sanction pénale. Les peines encourues sont un emprisonnement d’un mois à un an et/ou d’une amende de 50€ à 1000€ (dans certains cas, à multiplier ± par 200). Le minimum des peines peut être doublé. Si la discrimination est commise par un agent public ou un fonctionnaire, l’emprisonnement va de deux mois à deux ans. En matière de discrimination à l’emploi, l’indemnité peut s’élever à 6 mois de rémunération brute.

Pour rappel, un candidat aux élections, qui aurait été condamné pour racisme ou discrimination peut être privé du droit d’éligibilité. La durée d’inéligibilité est fixée par le jugement. S’il exerce une fonction politique (parlementaire, échevin), c’est aussi le jugement qui fixera le moment où il ne peut plus exercer ses fonctions.

MAJ 2024

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Les conséquences du racisme et des discriminations sur notre vie quotidienne

Le racisme et les comportements qu’il provoque sont nourris par des phénomènes complexes dans lesquels il y a une grande part d’imaginaire et de fantasmes (celui qui est différent est une menace même s’il n’est pas présent physiquement).
Il s’exprime au niveau politique (l’extrême droite) et souvent dans la vie quotidienne où il y a un énorme gouffre entre les discours politiques, les lois contre le racisme et les discriminations, d’une part et la vie de tous les jours et ce à quoi sont confrontées les personnes d’origine étrangère, d’autre part.

Le racisme peut provoquer des discriminations raciales, des propos racistes et des violences racistes. La discrimination raciale n’est pas nécessairement accompagnée de propos et/ou de violences racistes et inversement, des propos ou violences racistes peuvent exister sans pour autant qu’il y ait discrimination.

Concrètement, le racisme et les discriminations sont présents partout : au travail (à travail égal, les femmes ont souvent un salaire moins élevé que les hommes, une personne d’origine immigrée aura beaucoup plus de difficultés à trouver un emploi (l’employeur chez qui il se présente vient « malheureusement » d’engager quelqu’un, on n’est pas raciste mais on préfère engager un belge)), dans le logement, dans la rue (disputes, bagarres), dans les discothèques, dans le sport (attitudes et commentaires racistes), sur Internet et même à l’école (les jeunes élèves issus de l’immigration sont souvent en situation difficile et exclus plus facilement de l’enseignement « traditionnel »).

Les conflits actuels peuvent aussi avoir pour conséquences le racisme et les discriminations.
Les victimes de racisme et de discriminations subissent de nombreuses injustices dont la difficulté de trouver un logement décent, la rémunération moindre des femmes pour un travail égal, etc.

La discrimination « ordinaire » : quelques tristes exemples

Dans la rue

  • Coups donnés en groupe à une personne de couleur ;
  • Insultes ;
  • Violences policières racistes ;
  • Contrôle d’identité discriminatoire (délit de sale gueule) ;
  • Harcèlement sexuel ;
  • Agressions homophobes.

A l’école

  • Les élèves issus de l’immigration sont souvent victimes d’inégalités dans leur scolarité au niveau de leur orientation scolaire (souvent orientés vers l’enseignement professionnel), au niveau de l’école qu’ils fréquentent. Le niveau socio-économique de leur entourage a évidemment une grande influence sur leur parcours scolaire. De véritables ghettos scolaires se créent où les élèves de certaines écoles sont essentiellement d’origine étrangère, où il n’y a plus de mixité culturelle et sociale ;
  • Les élèves handicapés ou malades sont régulièrement discriminés et souvent orientés vers l’enseignement spécialisé.

Au travail

  • Possibilités d’emploi limitées pour les personnes d’origine étrangère, ce qui entraîne une grande précarité et pauvreté ;
  • Peu de diversité dans les médias ;
  • Les travailleurs d’origine immigrée se retrouvent pendant plusieurs années avec des contrats précaires, acceptent des emplois sous-qualifiés, certaines entreprises n’engagent pas de personnes d’origine immigrée sous prétexte que les clients n’en veulent pas ;
  • Difficultés des femmes à accéder à des postes à responsabilité et à avoir des salaires égaux à ceux des hommes.

Dans les administrations, les transports publics

  • De nombreuses « blagues » racistes circulent entre membres du personnel ;
  • Un chauffeur de bus refuse qu’une personne étrangère monte dans le bus.

En matière de logement

Le droit au logement est un droit fondamental et pourtant de nombreuses discriminations existent dans ce domaine :

  • Refus de louer ou de vendre à une personne d’origine étrangère ;
  • Refus de louer aux personnes dépendant du CPAS ;
  • Conditions financières plus exigeantes et garanties exigées pour les personnes d’origine étrangère ;
  • Refus de louer à un couple homosexuel.

En matière de santé

  • Personnes affectées d’un problème de santé mentale exclues socialement ;
  • Personnes atteintes d’un handicap dont l’insertion professionnelle est très difficile ;
  • Certaines administrations ou hôpitaux ont tenté d’imposer un test sida pour les candidats à l’emploi ;
  • Refus d’être soigné par un médecin d’origine étrangère ;
  • Attitude homophobe d’un médecin par rapport à son patient.

En matière de loisirs

  • Dans le sport, les insultes racistes ne sont pas rares contre des joueurs d’origine étrangère, de la part du public ou entre joueurs ;
  • Dans les boîtes de nuit, l’entrée est refusée sous différents prétextes : il faut être accompagné, être sur la guest list, il faut être membre, c’est une soirée « privée ».

Orientation sexuelle

Les personnes homosexuelles subissent régulièrement l’homophobie. Le phénomène de discrimination des LGBTQIA+ (personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transexuels, queers, intersexes, asexuelles) est toujours présent en Belgique. Ces personnes se voient par exemple refuser la location d’un logement, obtiennent difficilement des informations sur l’état de santé de leur partenaire admis à l’hôpital, reçoivent avec beaucoup d’obstacles des prêts bancaires, sont harcelées sur leur lieu de travail, sont injuriées, agressées physiquement, subissent des traitements différenciés dans l’enseignement, éprouvent des difficultés pour obtenir le statut de cohabitant légal ou pour se marier.

Identité religieuse

Racisme grandissant face à certaines identités religieuses, surtout contre les musulmans, le terme « islamiste » qui est lié à la pratique religieuse, est devenu synonyme de terroriste.

Sur Internet

L’anonymat, la fugacité des messages, la difficulté de contrôle facilitent la diffusion de messages racistes ou de haine sur Internet.
La notion de « Cyberhaine » recouvre les expressions de haine (brimades, insultes, propos discriminatoires) sur Internet à l’encontre de personnes en raison de leur couleur de peau, leur prétendue race, leur origine, leur sexe, leur orientation sexuelle, leurs convictions philosophiques ou religieuses, leur handicap, leur maladie, leur âge, etc.
De très nombreux messages de haine circulent sur les réseaux sociaux.

MAJ 2024

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La loi contre la discrimination entre femmes et hommes ou Loi Genre

Introduction

La loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre la discrimination entre les femmes et les hommes naît de la volonté du législateur fédéral d’harmoniser la lutte contre les différentes formes de discrimination et surtout mettre sur pied un cadre général dans la lutte pour l’égalité des femmes et des hommes en Belgique. Cette lutte n’était pas globale et se faisait par domaine précis (représentation des femmes en politique, protection des femmes enceintes sur le lieu de travail, etc.). Cette réforme de 2007 a voulu apporter une meilleure lisibilité du système législatif afin de combattre plus efficacement les inégalités entre les femmes et les hommes et le sexisme et inclure les discriminations qui découlent de certains changements sociétaux, comme la transidentité.

Cette loi est également désignée sous les termes « loi genre ». Elle compose, avec la loi du 30 juillet 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme ou la xénophobie et l’autre loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discriminations, l’arsenal juridique, au niveau fédéral, en matière de lutte contre les discriminations en Belgique.

Loi genre et la prise en compte de l’égalité femme-homme en Belgique

La loi genre interdit toute discrimination fondée sur le sexe, la grossesse, la procréation médicalement assistée, l’accouchement, l’allaitement, la maternité, les responsabilités familiales, l’identité de genre, l’expression de genre, les caractéristiques sexuelles et le changement de sexe. Ces éléments constituent ce que la loi qualifie de « critères protégés ». Lorsqu’une situation de discrimination se présente, seule la violation de ces critères peut valoir condamnation et donc être qualifiée de situation ou comportement discriminatoire en vertu de la loi.

Du fait de l’importance de la lutte pour l’égalité des femmes et des hommes au niveau international et national, le législateur fédéral n’est pas le seul habilité à légiférer à ce sujet. Les entités fédérées (les régions et les communautés) peuvent également prendre des décrets ou des ordonnances qui traitent de la problématique du genre dans le respect de leurs pouvoirs respectifs. Voici une liste non-exhaustive des décrets ou ordonnances prises en matière de lutte contre les discriminations :

Champ d’application

Les dispositions de la loi s’appliquent dans le cadre des relations de travail et la fourniture de biens et de services mises à la disposition du public que ce soit dans le secteur public (par exemple, un service communal) ou le secteur privé (par exemple, une assurance). La loi ne s’applique donc pas dans les rapports privés ou intrafamiliaux.

Cette loi comporte un volet civil et un volet pénal [1]. Cela signifie que la loi définit les discriminations et les moyens à mobiliser en cas de traitement défavorable sur base des critères protégés, en ce compris les règles procédurales, d’un côté, et détermine les infractions qui peuvent découler de ces discriminations, de l’autre côté.

La loi détermine cinq formes de discrimination :

La discrimination directe

La loi vise la situation qui se produit lorsque, sur la base de l’un des critères protégés, une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre personne ne l’est, ne l’a été ou ne le serait dans une situation comparable.

Par exemple, refuser d’engager une personne parce qu’elle est enceinte.

La discrimination indirecte

La situation qui se produit lorsqu’une disposition, un critère ou une pratique apparemment neutre est susceptible d’entraîner, par rapport à d’autres personnes, un désavantage particulier pour des personnes caractérisées par l’un des critères protégés.

L’injonction de discriminer

Ce terme vise tout comportement consistant à enjoindre à quiconque de pratiquer une discrimination, sur la base de l’un des critères protégés, à l’encontre d’une personne, d’un groupe, d’une communauté ou de l’un de leurs membres.

Le harcèlement

Le harcèlement désigne un comportement indésirable qui est lié à l’un des critères protégés, et qui a pour objet ou pour effet de porter atteinte à la dignité de la personne et de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant.

Par exemple, une personne, en transition médicale, ne cesse de recevoir de la part de certains collègues des remarques offensantes. 

Le harcèlement sexuel

Il s’agit d’un comportement non désiré à connotation sexuelle, s’exprimant physiquement, verbalement ou non verbalement, et qui a pour objet ou pour effet de porter atteinte à la dignité d’une personne et, en particulier, de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant.

Par exemple, un(e) stagiaire reçoit des avances de la part de son/sa maître de stage. Malgré des réponses négatives, le maître de stage continue et n’hésite pas à essayer d’embrasser le/la stagiaire.

Justification d’une discrimination : conditions

La loi reconnait la possibilité d’instaurer une distinction mais cette dernière doit respecter certaines conditions. En effet, une distinction directe fondée sur le sexe doit être justifiée par une exigence professionnelle essentielle et déterminante. Cela signifie qu’une distinction fondée sur ce critère protégé doit impérativement résulter de la nature de l’activité ou les conditions de son exercice. Il faut également que cette exigence obéisse à un objectif légitime et qu’elle soit proportionnée par rapport à cet objectif. Cette distinction est autorisée uniquement dans le domaine des relations de travail.

Contrairement à la loi antiracisme et la loi anti-discrimination, les exigences professionnelles essentielles et déterminantes justifiant une distinction sont fixées par l’Arrêté Royal du 8 février 1979 fixant les cas dans lesquels il peut être fait mention du sexe dans les conditions d’accès à un emploi ou à une activité professionnelle. Nous pouvons citer le domaine du mannequinat ou encore celui du cinéma. En dehors des cas énoncés par l’Arrêté Royal, un employeur ne peut se permettre de distinguer.

Dispositions de protection

La loi instaure un système de protection contre les représailles. En effet, il peut arriver que lorsqu’une personne dénonce aux autorités compétentes la discrimination dont elle a fait l’objet ou dont elle a été le témoin, l’auteur de la discrimination décide d’user de son pouvoir pour écarter ou de rendre l’existence difficile à cette personne. La loi prévoit donc une protection pour la (les) victime(s) et le(s) témoin(s) dès qu’une plainte a été introduite par la victime ou le témoin.

Par exemple, un(e) supérieur hiérarchique ne cesse de faire des allusions sexuelles à un de ses employé(e)s. Cette personne demande à ce dernier/cette dernière de mettre un terme à ce climat. Malheureusement rien n’y fait. La personne harcelée décide de porter plainte. Le/la supérieur(e) l’apprend et, depuis, fait en sorte de pousser la victime à la faute. Le/la supérieur(e) finit par le/la licencier.

Afin de ne pas décourager les personnes qui agissent pour remédier à une discrimination, des mesures de protection contre les représailles ont été adoptées et même renforcées. Le principe de la protection interdit à l’auteur présumé de la discrimination, durant 12 mois, d’adopter une mesure préjudiciable à l’encontre de la victime présumé, pour des motifs qui sont liés au dépôt ou au contenu d’un signalement, d’une plainte ou d’une action en justice pour une violation alléguée des législations contre les discriminations. La même protection est accordée à toute personne qui intervient comme témoin ou qui donne des conseils ou apporte aide ou assistance à toute autre personne qui invoque la violation des législations contre les discriminations. Le point de départ de la période de 12 mois est le moment où l’auteur présumé de la discrimination a connaissance ou a pu raisonnablement avoir connaissance du signalement ou de la plainte concernant un acte de discrimination, dirigé contre lui. Après ces douze mois, la personne qui agit pour remédier à une discrimination est toujours protégée contre l’adoption des représailles, mais il lui revient de prouver qu’un acte préjudiciable pris à son encontre après 12 mois est une mesure de représailles liée à une dénonciation d’un cas de discrimination. 

Remèdes civils en cas de discrimination

S’il est établi qu’une mesure préjudiciable a été adoptée, la victime peut demander des dommages et intérêts à l’auteur de la mesure discriminatoire.

La victime peut aussi demander sa réintégration dans son emploi pour pouvoir exercer sa fonction sous les mêmes conditions que précédemment.

Elle peut également introduire une action en cessation. Comme son nom l’indique, cette action a pour objectif d’interpeller l’auteur de la discrimination et exiger de sa part qu’il fasse cesser la discrimination. La victime peut prétendre à une indemnité forfaitaire et le juge peut ordonner l’affichage de la décision de cessation dans les lieux où la discrimination a eu lieu ou des locaux qui appartiennent à l’auteur ou encore la diffusion du jugement dans la presse. La victime ou les personnes habilitées par la loi pour représenter la victime en justice peuvent introduire cette action en cessation (par exemple l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes ou, dans certaines conditions, votre syndicat).

Charge de la preuve

Dans le cadre d’une procédure civile, la charge de la preuve en matière de discrimination est renversée. Il revient à l’auteur présumé de la discrimination de démontrer qu’il n’y a pas eu de discrimination de sa part. Toutefois, la victime n’est pas exempte d’apporter la démonstration du comportement discriminatoire. En effet, elle doit apporter des preuves de discrimination pour étayer ses dires : des écrits, des témoignages, des précédents signalements pour discrimination à l’égard de l’auteur, etc. D’ailleurs, c’est parce que la personne victime apporte des éléments concrets qui permettent de supposer une discrimination que l’auteur présumé doit prouver qu’il ne s’est pas rendu fautif d’un acte discriminatoire.

Dispositions pénales

Comme expliqué plus haut, la loi genre comporte également un volet pénal. Cette partie fixe les différentes infractions qui découlent de certains comportements jugés inacceptables par le législateur.

Les décrets et les ordonnances relatives à la question de l’égalité des femmes et des hommes prévoient également des dispositions pénales.

Parmi les infractions que nous pouvons retrouver dans la loi genre, nous pouvons, par exemple, citer les suivantes :

  • L’incitation à la haine, la discrimination, la violence ou la ségrégation d’une personne, un groupe, une communauté ou leurs membres, qui se fonde sur un des critères protégés ;
  • Le fait de ne pas se conformer au jugement de la demande de cessation.

Organisme compétent pour introduire une action

C’est l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes qui est compétent pour surveiller l’application de cette loi. Si vous avez-vous l’impression d’être victime de discrimination de genre, n’hésitez pas à prendre contact avec l’Institut. Il peut vous aider à préparer votre dossier : porter plainte, prendre part à une médiation ou agir en justice.

Renforcement de la loi genre

Une évolution de la loi est envisagée au niveau fédéral. En effet, l’avant-projet de loi de la secrétaire d’État à l’égalité des genres, l’égalité des chances et la Diversité, Sarah Schiltz, a été approuvé par le Conseil des ministres en décembre 2022. Cet avant-projet [2] de loi vise à renforcer les lois en matière de discriminations et de racisme. Concernant la loi genre, nous pouvons énoncer les modifications suivantes :

  1. La modernisation des critères de discrimination : le terme changement de sexe est désormais remplacé celui de transition médicale ou sociale. Le critère dorénavant protégé est donc celui de la transition médicale ou sociale. Ce changement de terminologie souhaite protéger les personnes transgenres à n’importe quelle étape de leur transition et non uniquement au moment où la transition médicale est effectuée ;
  2. L’introduction des nouvelles formes de discrimination : les discriminations multiples, la discrimination par association et la discrimination fondée sur un critère supposé ;
  3. Le renforcement des sanctions civiles : l’obligation pour le juge d’accorder des dommages et intérêts lorsque la victime le réclame et que l’existence de la discrimination a été établie, l’augmentation des montants des dommages et intérêts et instauration d’une indexation de ceux-ci ;
  4. La réforme du Code pénal avec la prise en compte systématique du motif discriminatoire.

[1] Le droit civil encadre les rapports entre les individus et règle les conflits qui naissent entre les particuliers. Ce droit comprend plusieurs branches telles que le droit de la famille, le droit économique, le droit des biens, des successions ou encore le droit des obligations.

Le droit pénal est le droit de la répression. En effet, ce droit rappelle à celui qui y contrevient que la loi a identifié des comportements qu’elle juge inacceptable dans la société. Ce droit a donc pour objectif de faire respecter l’ordre public et, de ce fait, protéger la société dans son ensemble.

En d’autres termes, en matière civile, le juge arbitre un litige qui oppose des personnes privées alors qu’en matière pénale, l’État, partie au procès, est présent pour défendre des valeurs et des comportements jugés essentiels par la loi au bon fonctionnement de la société.

[2] https://sarahschlitz.be/la-lutte-contre-les-discriminations-se-renforce-avec-lamelioration-des-3-lois-concernees/ ; un avant-projet de loi est un texte soumis par un membre du gouvernement fédéral à l’approbation du Conseil des ministres. Si le Conseil approuve ce texte, il le dépose à la Chambre des représentants en vue de l’éventuelle adoption d’une loi.

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